Au procès des viols de Mazan, l’indéfectible soutien des compagnes de plusieurs accusés

Au procès de Dominique Pelicot et de 50 hommes accusés de viols aggravés sur Gisèle Pelicot, palais de justice d’Avignon (Vaucluse), 10 septembre 2024.

Au procès de Dominique Pelicot et de 50 hommes accusés de viols aggravés sur Gisèle Pelicot, palais de justice d’Avignon (Vaucluse), 10 septembre 2024. CHRISTOPHE SIMON / AFP

Temps de lecture : 6 min.

En accès libre

Récit  Trois compagnes ou anciennes compagnes d’hommes accusés de viols aggravés sur Gisèle Pelicot se sont exprimées, lundi, devant la cour criminelle départementale du Vaucluse à Avignon. Toutes ont confié leur stupéfaction, et leur soutien sans faille.

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A peine arrivée à la barre, elle déverse déjà ce qu’elle semble avoir trop longtemps retenu. « J’entends beaucoup dans la presse que ces hommes sont “Monsieur Tout-le-Monde”. J’ai toujours clamé qu’il était différent, je l’ai vu dès que je l’ai rencontré, balance Nadia (le prénom a été changé), 44 ans, longs cheveux châtains et tenue claire, ce lundi 30 septembre, devant la cour criminelle départementale du Vaucluse. Pour moi, il avait des troubles du spectre autistique, je ne comprends pas pourquoi personne ne s’en est rendu compte : ni sa première compagne ni la seconde dont le père était médecin. » Puis d’une traite, sans reprendre son souffle : « Sa mère était névrosée, ses parents, c’était la loi de l’omerta, lâche-t-elle. Il a été confronté à pas mal de choses compliquées dans son enfance qui se perpétuent dans sa vie d’adulte. » Depuis le box vitré spécialement ajouté, au palais de justice d’Avignon, pour le procès de Dominique Pelicot et de 50 hommes pour viols aggravés sur son ex-femme Gisèle Pelicot, Jérôme V., 46 ans, l’écoute sans ciller.

Alexithymie primaire ?

En mars 2021, quand cet ancien pompier volontaire employé d’une supérette a été arrêté puis incarcéré, cela faisait deux ans qu’ils étaient ensemble. Ils venaient tout juste d’acheter une maison. C’est durant cette période que Jérôme V. s’est rendu six fois, entre la fin mars et la mi-juin 2020, au domicile des époux Pelicot, à Mazan. « Il ne me l’a pas dit, je lui en veux beaucoup », poursuit Nadia, avant de répéter sans sembler mesurer la réalité ni la gravité des faits : « Il n’avait pas de raison d’aller voir ailleurs. » A l’ouverture du procès, lui rappelle le président de la cour Roger Arata, Jérôme V. a reconnu « l’entièreté » des faits de viols aggravés soit, contrairement à d’autres, « leur matérialité et leur intentionnalité ». Nadia pleure. Dans l’espoir de comprendre, dit-elle, elle l’a questionné plusieurs fois au parloir. « Depuis trois ans et demi, je creuse, je cherche des réponses, livre celle qui travaille dans le domaine médical. J’ai pensé au syndrome d’Asperger, je pense maintenant à une alexithymie primaire [Le sujet est incapable de ressentir et d’exprimer des émotions, NDLR], pour moi c’est une évidence. » Puis elle dit la « détonation » de son interpellation.

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« Quand la police est venue à la maison, j’ai demandé quels faits lui étaient reprochés, rapporte-t-elle. On m’a dit que j’étais peut-être victime, qu’on ne pouvait pas me le dire. Puis on a fini par me dire “On accuse votre compagnon de viols aggravés” et je me suis effondrée. Je ne savais plus quoi dire. On m’a fait une analyse de cheveux [pour voir si elle aussi aurait été droguée, NDLR], je me suis dit “C’est pas possible”. » Jérôme V. a fini par lui en parler. « Il a mis du temps à me dire qu’il y était allé six fois, mais encore aujourd’hui je ne connais pas les détails. Je pense que c’est pour me protéger. » Elle pleure encore. Pendant l’enquête – qui a révélé l’existence de vidéos, pour chaque accusé, archivées par Dominique Pelicot –, lors d’une audition, Nadia a dit avoir souffert de pertes de mémoire. Et a encore questionné Jérôme V. au parloir. « Je lui ai dit “Tu m’as droguée ? Tu m’as fait quelque chose ?” Il m’a assuré que non» Elle crie presque : « Mais pourquoi ne m’a-t-il pas dit ce qu’il s’était passé ? » Puis la voix tant envahie de larmes qu’elle est presque inaudible : « Est-ce que j’aurais pu sauver cette dame ? J’aurais pu intervenir, être à son chevet. Je m’en voudrais tout le temps. Elle est où Madame Gisèle ? » Elle se tourne vers Gisèle Pelicot :

« A défaut d’avoir pu vous sauver, Madame Gisèle, je vous apporte tout mon soutien. Je regrette. Mon métier à moi, c’est de sauver les gens. »

« Manque de limites morales »

Avant elle à la barre, une enquêtrice de personnalité a rappelé « l’éducation rude et carencée » de son compagnon, « son manque de limites morales », son enfance difficile marquée par des violences physiques, psychologiques et verbales, la peur du père, les constantes remarques dévalorisantes de la mère, « l’intolérance à la frustration » relevée par certaines de ses compagnes, ses infidélités, la possibilité d’une addiction au sexe, « les réelles difficultés à investir l’aspect émotionnel de l’autre ». « Je ne suis pas magicienne, mais j’ai essayé de refaire toute son éducation en deux ans, déclare alors Nadia. Je ne lâche pas l’affaire, pour qu’il voit que c’est pour lui, il a énormément de mal à vivre en société, j’espère qu’il va entendre ce message. » Elle raconte aussi que sa propre fille, sous chimiothérapie, très choquée de voir Jérôme V. menotté lors de son interpellation, a souffert juste après d’une hémorragie cérébrale. « Son médecin m’a appelé pour me dire “Vous êtes où ? Venez vite, elle doit être opérée d’urgence.” J’ai failli perdre ma fille dans cette histoire. » Elle pleure encore.

A côté du box où se trouve son compagnon, l’autre box est vide. Dominique Pelicot est absent. A nouveau souffrant, il devait subir une intervention médicale dans l’après-midi. Nadia le regrette. « J’aurais pu lui dire ce que j’ai sur le cœur. Il a détruit sa famille, mais pas seulement. On est les victimes collatérales de cette histoire, il a détruit énormément de vies à côté. » Elle rend toujours visite à son compagnon au parloir. « Il a quand même avancé, les choses sont en chemin, souffle-t-elle. Je suis là pour le protéger, j’ai vraiment envie qu’il prenne conscience de tout ça et de pourquoi on est là. »

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Dans la matinée, Sylvie (le prénom a été changé), 53 ans, blouson de cuir noir et longs cheveux auburn, ex-compagne de l’accusé Thierry P., 53 ans, a raconté comment leur vie a basculé, le 1er janvier 2016, quand leur fils a été tué dans un accident de la route. Puis la descente aux enfers de son mari, maçon, qui ne s’en est pas remis et a sombré dans l’alcool et la dépression. Avant de se rendre chez les Pelicot en juillet 2020. Quand elle a appris ce qu’on lui reprochait, sa femme n’y a pas cru. « Je me suis dit : “Jamais de la vie ! Ça ne lui ressemble pas, c’est pas possible !” », s’est-elle exclamée.

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Elle a insisté sur le fait qu’il n’avait jamais eu avec elle le moindre geste déplacé. « Je ne comprends absolument pas pourquoi il est là aujourd’hui », a-t-elle aussi déclaré. Sylvie a essayé d’en parler avec lui. En vain. « Il n’a pas les mots. Il ne sait pas. Ce n’est pas quelqu’un qui s’exprime beaucoup », dit-elle. « Je pense qu’aujourd’hui, il est sur le bon chemin, estime toutefois celle qui ne compte pas non plus le laisser tomber. On se revoie, on se recôtoie, on essaie, on verra»

« Il m’a protégée »

Jeudi dernier, l’ex-compagne de Joan K., 26 ans, lui a, elle aussi, témoigné son soutien. « Je serai toujours là pour lui, quoi qu’il arrive, a déclaré la jeune femme de 24 ans, car il m’a protégée de tous les problèmes que j’ai eus dans ma vie. » « Ce n’est pas ce genre de personne, même dans toute ma famille on n’y croyait pas, il n’est pas comme ça », a-t-elle soutenu, persuadée qu’il avait été manipulé par Dominique Pelicot.

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Des propos qui font écho à ceux tenus lundi 30 septembre après-midi par Sandra (le prénom a été changé), compagne de Simone M. Fiancée depuis un an à l’accusé avec lequel elle a un enfant, l’esthéticienne de 28 ans a insisté sur sa « gentillesse », sa « sociabilité », sa « grande empathie », son « honnêteté »« Il m’a dit de suite ce qu’il s’était passé, à ma famille aussi d’ailleurs. Je ne vois pas ce qu’il vient faire dans cette histoire. Je ne vois pas ce qu’il fait là… », a-t-elle enchaîné face aux magistrats.

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Une magistrate : « Que vous a-t-il dit ?

– Qu’une dame avait été malheureusement violée, qu’il avait été voir car il n’était pas bien à cause de son ex-compagne, mais que ce n’était pas du tout ce à quoi il s’attendait et qu’il était parti de suite. »

Stéphane Babonneau, avocat de Gisèle Pelicot : « Il vous a seulement dit cela ?

 Il n’est pas entré dans les détails. Je n’ai pas posé plus de questions ni regardé internet. Simone est une personne de confiance.

Vous pensez qu’il l’a touchée ?

–  Il m’a dit la vérité. Où voulez-vous en venir ?

C’est un peu difficile pour notre cliente de vous entendre dire à quel point il est gentil, puis qu’il vous a tout dit. Nous avons vu une vidéo, Madame. »

 Il m’a dit la vérité.

– Quelle vérité ?

Je ne suis pas avocat. Vous en parlerez avec lui. »

Jérôme V., Thierry P., Simone M. et quatre autres accusés doivent être entendus cette semaine.

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